Lorsque mettre le couvert pouvait sauver la vie

Actualités - 06 avril 2010

Pour tous les francophones, l’expression « Mettre le couvert » signifie dresser la table, en y plaçant les ustensiles (couteaux, fourchettes, cuillères, verres, salière, etc.) servant au repas des convives. Le sens était bien différent au 15ème siècle, époque rude durant laquelle certains sournois n’hésitaient pas à occire leurs contemporains, rivaux ou simples opposants, par des procédés aussi expéditifs que divers, y compris en leur faisant avaler de substances fatales, connues aujourd’hui dans le langage familier sous le nom de potion du docteur Bonnedose, ou de bouillon de la mère Tapedur (l’amer Tapedur, si l’on veut). Plus sérieusement, certains empoisonneurs (et …neuses) célèbres ont jalonné les siècles depuis l’Antiquité. Ont ainsi laissé leur nom à la postérité : Agrippine la Jeune, Néron, Charles II de Navarre (dit Charles le Mauvais), les Borgia (qui ont même monté l’activité funeste en affaire familiale), Marie Lafarge, Madame de Montespan (protagoniste de la fameuse affaire des poisons sous Louis XIV), Marie Besnard, etc.

Afin de se prémunir contre de tels procédés radicaux, nobles et autres grands de ce monde actif en brûlure d’estomacs faisaient appel à des goûteurs… et mettaient le couvert. Rien à voir avec un assouplissement des codes hiérarchiques qui régissaient la société du 15^ème siècle : dès sa préparation achevée en cuisine, sous l’oeil vigilant de l’écuyer, le plat et le verre étaient ainsi couverts d’une cloche, d’un couvercle ou d’une étoffe. De fait, le mets ou la boisson pouvaient ainsi arriver jusqu’à la table sans qu’une personne aussi rancunière qu’indélicate ne puisse y verser de poison, aller simple pour l’au-delà.

Rassurons les amateurs de Munster, fourme d’Ambert et autre Livarot en leur précisant que les cloches à fromage ne répondent pas aujourd’hui à la même prophylactique utilité…

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