Etiquette énergétique et électroménager : le grand bluff ?

Actualités - 27 juin 2017

Etiquette énergétique et électroménager : le grand bluff ?

Après le dieselgate, un frigogate ? Telle est la question soulevée par nos confrères du Parisien dans plusieurs articles publiés la semaine dernière, suite à une étude rendue publique par le Bureau Européen de l’Environnement le 21 juin dernier.


Dans une interview accordée au Parisien, Benoît Hartmann (photo ci-dessus) directeur général du CLER, ONG française membre du Bureau Européen de l'Environnement (BEE) déclare : « Pour certains réfrigérateurs, la consommation peut être 32 % plus élevée, et six sur dix affichaient des volumes plus élevés que celui qui avait servi de base au test d'homologation. » Le BEE, qui fédère 140 ONG de 28 pays différents remet en cause la fiabilité de l’étiquette énergétique des appareils électroménagers suite à des tests réalisés sur 20 produits. Or, cette étiquette, reconnue des consommateurs, est devenue « le deuxième critère de choix après le prix », assure Benoît Hartmann dans cette même interview...

 

Plusieurs études déplorent une surconsommation des appareils. Mais le BEE n’est pas le seul à monter au créneau. Son étude semble corroborer les résultats de tests réalisés en 2015 par le magazine 60 Millions de Consommateurs sur des lave-vaisselle ; ils pointaient déjà du doigt, dans le cadre d’une utilisation du programme normal, « une surconsommation de 19 % pour l’eau et 21 % pour l’électricité ! ». Du côté du BEE, on tire la même conclusion : « Les chiffres annoncés ne sont valables que si vous pressez la fonction Eco. Quand vous activez un autre mode de lavage, la consommation d'énergie peut grimper de 70 %. Il faudrait les tester avec tous les modes et faire la moyenne. Nous ne nions pas que la performance des appareils se soit améliorée, mais aujourd'hui les tests sont pour partie devenus obsolètes. »


Cette remise en cause des promesses de performances énergétiques faites par les fabricants d’électroménager fait écho au récent « dieselgate »… Benoît Hartmann trouve la comparaison avec le secteur automobile pertinente : « Comme pour les tests réalisés sur les voitures, où le modèle d'essai est spécialement conçu pour consommer le moins possible, les fabricants optimisent leurs appareils avant de les passer au banc d'essai. Mais cela ne reflète pas les conditions normales d'utilisation : contrairement à ce qui se fait en test, vous ouvrez et fermez plusieurs fois par jour votre frigo et vous mettez des vrais aliments dedans. Au final, son efficacité énergétique réelle n'est pas celle que l'on vous a vendue. Les frigos devraient être testés avec des aliments dedans et des ouvertures de portes plus systématiques. »

 
Il semblerait donc que les fabricants y aillent de leurs petites ruses pour passer les tests... Mais ces derniers se défendent de toute tricherie, à travers la voix du Gifam (Groupement interprofessionnel des fabricants d’appareils d’équipement ménager). D’après son directeur technique, Patrick Le Dévéhat, ces derniers dépensent d’ailleurs 1,4 milliard d’euros par an pour mettre sur le marché des appareils plus performants en matière d’économie d’énergie. Ils sont tenus, selon les normes en vigueur, de suivre un protocole d’essais scientifiques très précis mené en laboratoire. Le Gifam assure qu’en 20 ans, ce sont 75% d’économie d’énergie sur un réfrigérateur qui ont ainsi pu être réalisés grâce à cette nouvelle étiquette et à ces normes. Le Gifam estime même que les fabricants sont « prêts à ce que des tests d’homologation évoluent pour être plus représentatifs de la vraie vie, mais encore faut-il respecter un protocole de mesure extrêmement précis qui s’appuie sur un consensus établi à l’échelle européenne ».

C’est justement la teneur de ces tests et leur fiabilité que pointent du doigt le BEE et l’UFC-Que Choisir à travers leurs études respectives, plus que les performances des appareils des fabricants en tant que telles. Le BEE affiche clairement sa volonté de les réviser, afin qu’ils soient plus en accord avec une utilisation répondant aux besoins de la vie quotidienne des consommateurs. L’UFC-Que Choisir appelle, quant à elle, à mettre en place « des procédures de contrôle transparentes sur les allégations de performance énergétique des fabricants ». Elle s’appuie, pour cela, sur plusieurs campagnes de vérification menées ces derniers mois par la Commission européenne sur une série d’équipements.

 

Dans un article du 17 juin, elle souligne d’ailleurs que « La Commission (européenne) estime que 10 à 25 % des produits mis sur le marché ne sont pas conformes aux exigences en matière d’étiquetage énergétique, faute de contrôles suffisants. » C’est donc sans surprise qu’elle s’est félicitée de l’annonce récente par le Parlement Européen de la mise en vigueur d’une nouvelle étiquette. Cependant il faudra patienter jusqu’à fin 2019 avant sa mise en œuvre … et certaines familles d’appareils auront jusqu’en 2030 pour s’y conformer.

 

Vanessa Barbier

 

Dernière minute !

Voici qui ne va pas arranger l’image de l’électroménager dans le grand public, en Angleterre du moins. Toujours dans Le Parisien, mais aussi dans divers autre médias, on a appris vendredi dernier (23 juin)  que « lors d'une conférence de presse organisée ce vendredi, la police britannique a affirmé avoir des «preuves» que le feu dans la tour Grenfell n'avait pas démarré volontairement, mais était dû à un dysfonctionnement d'un réfrigérateur, un FF175BP de la marque Hotpoint, fabriqué par le numéro un mondial de l'électroménager Whirlpool ». Détails en cliquant ici.      

 

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