Brexit : quelles conséquences pour la cuisine en France ?
En moins de temps qu’il n’en faut à l’Eurostar pour traverser le Channel, quelques éléments chiffrés montrent que l’impact sera relatif et concernera plus l’industrie française que notre marché intérieur.
« Nous entrons dans l’inconnu ». Il ne s’agit pas des mots du capitaine d’un vaisseau spatial pénétrant dans un trou noir, ni d’un explorateur d’un roman d’Abraham Meritt posant le pied sur un nouveau continent. La sentence vient des observateurs d’un continent quant à lui qualifié de Vieux, qui, depuis l’annonce de la victoire des partisans de la sortie de l’Union européenne au référendum britannique le 23 juin, la répètent à l’envi, avec raison pour les uns, par goût du sensationnel pour les autres faisant fi des conséquences pires que la cause des annonces anxiogènes. En réalité, une fois passée l’émotion, rarement bonne conseillère, et en espérant que les marchés financiers, trop souvent capricieux, sauront retrouver rapidement l’optimisme fondé ou non qui justifie leur existence et leur prospérité, la raison rappellera que la sortie effective du Royaume-Uni ne se fera pas avant deux ans, le temps de détricoter les milliers d’accords et traités qui avaient tissés. Des Mille et une nuits à la sauce Picadilly, en quelque sorte.
A défaut de lire dans une boule de cristal pour connaître les conséquences géopolitiques de cette sortie des Britanniques de l’U.E, notamment pour savoir s’il y aura un effet dominos dans les pays continentaux, on s’en tiendra aux éléments concrets pour dessiner quelques effets sur le marché de la cuisine. Ces éléments sont de deux natures. La première est monétaire, ce qui amène à rappeler que le Royaume-Uni n’a jamais été intégré totalement à l’U.E, continuant à disposer de sa propre monnaie nationale lorsque la plupart des autres ont abandonné la leur au profit de l’euro. La seconde nature d’élément concerne les volumes d’échanges avec l’industrie et le marché français de la cuisine.
Ces données ont été précisés dans la vaste étude menée par le Csil pour L’Unifa dont nous avons reproduit les principaux chiffres dans notre article du 5 avril, consultable en cliquant sur le lien suivant Le marché mondial de la cuisine. On y apprend ainsi le Royaume-Uni se classe au 8ème rang des producteurs de cuisines, derrière les Etats-Unis, le Japon, la Chine, l’Allemagne, le Canada, l’Italie et la Russie, mais devant la France. Cela peut sembler lui conférer un impact fort, mais le faible pourcentage du total - 4 % seulement - infime radicalement cette impression.
Le Royaume-Uni n’apparait pas dans les 10 premiers exportateurs de cuisines. Il est classé au 9ème rang mondial des importateurs de cuisines, après avoir grimpé au 3ème rang en 2007 et 2008. De fait, comme on le peut le voir sur le tableau ci-dessous, la valeur de ses importations a été divisée par deux entre 2008 et 2013, la tendance à la baisse se poursuivant, en raison d’une concentration des achats sur la production locale, revendue notamment par des enseignes à bas prix (Home Retail Group, Magnet, B&Q), pouvant être comparées à nos GSB (Leroy Merlin, etc.) et GSA (Conforama).
Pesant 1,8 milliards d’euros (données de 2014), le Royaume-Uni est le 2ème marché européen, derrière l’Allemagne avec 2,9 Mrds €, et devant l’Italie (1,6 Mrds €) et la France (1,4 Mrds €).
C’est ici qu’intervient la dimension monétaire. En quittant l’Union européenne, la Grande-Bretagne ne change pas de devise, mais sa Livre sterling risque fortement d’être dévaluée durablement (la réaction panique des marchés l’ayant fait plonger à son plus bas depuis 31 ans, vendredi dernier, à l’annonce des résultats du référendum). Cela favorisera ses exportations de cuisines, sans réel impact sur le marché français, car elles les marques de Sa Majesté sont loin d’y être aussi représentées que leurs concurrentes allemandes, italiennes ou espagnoles (on peut aussi ajouter suédoise avec Ikea). En revanche, cela fera monter le prix des cuisines importées. Or, même si le montant global n’est pas déterminant pour l’industrie française, divers fabricants de l’Hexagone, à commencer par le groupe Fournier qui avait ouvert des magasins l’an passé outre-Manche, considéraient jusqu’à présent ce marché insulaire comme un débouché commercial d’importance.
Visuel : montage réalisé par Culture Cuisine avec un visuel non contractuel de réfrigérateur Smeg
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